• Les parrainages, le PS, l'UMP et la fracture démocratique par Philippe Meyer

    Pendant que le Président de la République et le Premier ministre annoncent leur intention d'allonger légèrement la période pendant laquelle les candidats à l'élection présidentielle peuvent ne plus se contenter de solliciter les promesses de parrainage mais recueillir leur concrétisation, l'UMP et le P.S veillent à ce que cette éventuelle réforme n'ait que peu d'effet, pour ne pas dire pas du tout.

    Les Etats-majors de ces deux formations ont donné à ceux des 47.289 élus habilités à parrainer qui appartiennent à leur parti une consigne dont ils ne cessent de dire qu'elle ne souffre aucune exception : ne signer pour aucun autre candidat que celui désigné par la formation à laquelle ils appartiennent.

    Quant aux élus sans étiquette, municipaux, départementaux ou régionaux, ils reçoivent la visite de Missi dominici du P.S ou de l'UMP chargés de leur faire comprendre que s'ils se laissaient aller à parrainer un « petit » candidat, aucune forme de représailles ne serait écartée. Au maire qui signerait bien pour l'un des candidats trotskystes, ou pour celui de Chasse Pêche et tradition, ou pour le représentant autoproclamé du gaullisme authentique, ou pour le leader du Front national, ou pour un écologiste indépendant, on a tôt fait d'expliquer que les subventions sont comme plumes au vent, ou qu'il pourrait se voir opposer aux prochaines échéances qui le concerneront, un candidat qui lui rendrait la vie difficile et l'élection malaisée.

    Ceux qui ont promu cette attitude radicale –pour ne pas dire sectaire- et qui veillent à son application intransigeante vivent dans l'angoisse- pour ne pas dire la panique- de la répétition d'un 22 avril 2002. Malheureusement, ils confondent les effets et la cause. Ce n'est pas parce que les électeurs ont eu il y a cinq ans à choisir entre de nombreux candidats qu'ils ont dispersé leurs voix au premier tour et négligé les soi-disant « grands » candidats. C'est parce qu'ils avaient l'impression –pour ne pas dire la conviction- que les prétendues grandes formations ne sont plus que des machines électorales à l'américaine et qui n'ont d'existence réelle que pour quelques mois, à la veille des échéances importantes. C'est aussi parce qu'ils considéraient que les thèmes qui leur paraissaient essentiels n'avaient pas, dans la campagne, la place ou le traitement qui leur paraissait nécessaire. Les études des politologues n'ont cessé de souligner la coupure réelle et ressentie entre la société et ses représentants. Les résultats du 21 avril 2002 ont donné la mesure de cet éloignement.
    Ou bien cette fracture a été réduite depuis cinq ans, ou bien, si elle ne l'a pas été, casser le baromètre ne servira de rien ou ne fera qu'aggraver cette situation et les ressentiments qu'elle a fait naître et qui trouveront à s'exprimer ailleurs que dans les urnes, et d'abord en ne s'y rendant pas.

    Les chaînes nationales de télévision, en ayant choisi, elles aussi, de réserver la part du lion aux deux candidats qu'elles appellent principaux ne font qu'aggraver cette fracture démocratique et, dès lors, la mesurette envisagée par Jacques Chirac et Dominique de Villepin peut difficilement être considérée comme autre chose, dans le meilleur des cas qu'un emplâtre sur une jambe de bois et, dans le pire, comme un trompe-l'œil voire un piège à...

    « L'esprit public » sur France Culture


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