• Entretien d'Emmanuel Todd à Télérama

    Face à la concurrence des pays émergents, un "protectionnisme européen raisonnable" s'impose, estime l'historien. Pourquoi l'économie n'est-elle pas au centre du débat électoral ?

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    Serait-il en voie de devenir le gourou des politiques ? Rappelez-vous sa fameuse note de l'automne 1994, Aux origines du malaise politique, qui permit à Jacques Chirac de mener campagne sur la « fracture sociale ». Peu se souviennent que, dès 1976, à l'âge de 25 ans, le jeune démographe Emmanuel Todd avait prédit dans La Chute finale la décomposition de l'Union soviétique. En 2002, il règle aussi le sort des Etats-Unis (Après l'empire) et continue de guetter leur effondrement. Et voilà qu'à l'automne dernier, il est parti en guerre contre les « candidats du vide » que sont à ses yeux Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal. Son nouveau combat ? La création d'une aire protectionniste européenne, afin de soulager les classes laborieuses des maux du libre-échange. A voir la virulence des réactions qu'il suscite, il semble que le petit-fils de l'écrivain Paul Nizan et le fils du journaliste Olivier Todd gratte à nouveau là où ça fait mal...
     
    Le 13 septembre 2006, vous déclariez dans une interview au Parisien : « Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy sont “les candidats du vide”. » C'est toujours votre opinion ?

    A ce jour, je ne vois pas ce qui pourrait me faire changer d'avis. Je les appelle comme ça non pas pour leur côté people, la brume autour de leur vie de couple, mais pour une absence de discours sur la seule chose qui intéresse et angoisse les Français : le système économique qui a engendré la pression sur les salaires et l'insécurité sociale. Toutefois, il serait injuste de jeter l'anathème sur Sarkozy sous prétexte qu'il dit tout et n'importe quoi, et sur Ségolène Royal parce qu'elle ne dit rien sur l'économie, sans ajouter que François Bayrou les a malheureusement rejoints. Je persiste à dire que s'ils ne mettent pas la question du libre-échange au cœur de leur programme, ils seront à côté de la situation réelle du pays, des souffrances des gens. Cela explique que la campagne ne démarre pas, et que le corps électoral ne suive pas.
     
    Vous dénoncez un « système médiatico-sondagier » qui aurait « imposé » le binôme Sarkozy-Royal...

    Dans les phases pré-électorales, avant que les thèmes aient été présentés par les candidats ou les partis, l'électorat populaire est inerte. Les sondages qui ont été réalisés à ce moment-là représentaient l'opinion des classes moyennes, et plutôt des classes moyennes supérieures, parmi lesquelles on trouve les journalistes, les sondeurs... Ces derniers le savaient mais, au lieu de reconnaître que leur boulot ne valait rien, ont préféré dire : « les sondages sont une photographie de l'opinion à un moment donné ». C'est une escroquerie ! Ils suggèrent que l'opinion change, alors qu'on assiste en réalité à un phénomène de formation, de cristallisation d'une opinion populaire qui n'existait pas et qui émerge dans le courant de la campagne.
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  • Commentaires

    1
    Lorimar
    Jeudi 1er Mars 2007 à 05:25
    L'entretien est intéressant
    Le problème est que dans toutes ces analyses il y a toujours un oubli. Cet oubli de taille est toujours le même. L'Europe ce n'est pas la France, et pour toutes choses il faut l'accord des autres (le débat franco francais sur la constitution était (est) à cet égard pathétique). A l'heure des réseaux d'informations planetaires instantanés et des avions faisant le tour de la terre en une journée, cette théorie bizarre d'une politique protectionniste europeenne possible est très improbable. Car à la différence de la France, la plupart ont fait des réformes et beneficient à plein de la mondialisation. Tout cela est donc très intéressant mais totalement fantasmatique. Il semble que beaucoup en France est du mal avec la perception et la compréhension du monde d'aujourd'hui. Des réalités toutes simple. Entre autres, la CEE à 10 membres, dans lequel la France avait une influence certaine, a fait place à l'UE à 27 membres et cela change tout. J'ajouterais accessoirement que la population Francaise ne représente même plus 1% de la population planétaire, que en 25 ans toutes les théories interventionniste appliquées on fait chuter la part du PNB français de 5,5 à 4,2% du total mondial, alors que celui des USA et du Royaume Uni a fortement augmenté en proportion (de 4,5 à 5 pour le RU, je crois et de quelque chose comme 24 à 28% pour les USA - à confirmer). Ces théories française que plus personne n'écoute à l'étranger ont donc vraiment un coté dérisoire et triste. Ce que dit Emmanuel Todd est intéressant mais pourquoi toute cette intelligentsia parisienne ne sortant jamais de Saint Germains des Près et se trompant depuis 30 ans sur les défits et réalités futur du monde se mettrait elle subitement à être lucide.
    2
    Lorimar
    Jeudi 1er Mars 2007 à 05:40
    Voila
    Je vis au Brésil. Quand j'observe de loin les débats et que j'entends des théories que j'entendais la bas en France il y a 20 ans, j'ai l'impression d'un pays immobile ou le temps s'est arreté. Alors que la planete est fortement en mouvement. D'ou une impression bizarre. Et je ne sais jamais s'il faut etre triste ou s'en amuser. Bonne continuation !
    3
    yann
    Jeudi 1er Mars 2007 à 19:31
    Des commentaires d'ideologues bien pensant
    "Car à la difference de la France, la plupart ont fait des reformes et beneficient à plein de la mondialisation" A bon l'euroland n'a plus de chomeur? Le libre-echange est une theorie stupide qui n'est plus defendu par les gens serieux. C'est une ideologie stupide, les pays du monde entier ont des problèmes. Les USA ont un déficit de 800Md$, la GB un déficit extèrieur de 115Md$, la mondialisation fonctionne avec des pays producteurs (Chine Japon, Allemagne) qui finances les pays déficitaire (USA, GB). TOUT LES PAYS DU MONDE NE PEUVENT PAS AVOIR D EXCEDENT COMMERCIAUX EN MEME TEMPS. L'excedent des uns fini par detruire l'economie des autres avec pour consequence l'endettement des menages et des etats, c est ca la mondialisation. Elle ne peut finir que par un enorme crack boursier et monetaire (l'economiste Krugman disant l'annees derniere que l'effondrement du dollars americain est plus une question de QUAND que de SI). L'epoque de la mondialisation heureuse est termine, c'est maintenant la gueule de bois. Les pays qui connaissent une croissance soutenue ont comme point commun d'etre tres dependant du consommateur sur-endette americain le jours ou celui-ci fera faillite les chinois les japonnais et les allemands seront dans un triste etat. Pour finir sachez que le protectionnisme est une pratique très repandue, seulement les pays qui le pratique ne le crie pas sur les tous toits. La russie de Putin empeche le rouble d'être reevaluer en achetant massivement des dollars, comme la chine et le japon . La triche monetaire est la forme moderne du protectionnisme et elle est tres efficace, la simple devaluation de l'euro en 1997 et 2000 avait reanime l'économie europeenne sans aucune "reforme" liberale. L'europe le continent le plus liberale de la planète est une preuve par l'absurde de l'ineficacite du liberalisme.
    4
    le Franc-tireur
    Jeudi 1er Mars 2007 à 22:11
    idéologie ?
    Le terme de "protectionisme" semble effectivement jouer comme un épouvantail... Rappelons, que le protectionnisme a une mauvaise presse notamment en raison de certains excés (je pense aux politiques qui visaient à protéger des secteurs économiquement obsolètescomme les "tarifs de J.Méline" qui visaient à maintenir la paysannerie française dans le XIXe siècle, pour maintenir aussi la structure sociale conservatrice d ela France d'alors). Ceci dit, je rejoint Yann : la plupart des pays usent effectivement, sans le dire, de mesures limitant leur dépendance à la concurrence étrangère : La Chine soumet ainsi le rachat par des étrangers de ses entreprises nationales à un contrôle drastique qui n'a rien à envier au "patriotisme économique" de notre gouvernement. Le fond du problème n'est pas de refuser par principe les échanges commerciaux avec l'extérieur, mais bien de ramener ceux-ci à un degré raisonnable. En effet, contrairement à ce qu'avance Lorimar, il me semble que la France à été un des pays les plus zélés en matière d'ouverture extérieure : prés de la moitié de notre capital est ainsi détenue par des investisserus étrangers (le degré de pénétration le plus élevé des pays du G8 - devant même le trés libéral Royaume uni !). Ajoutons, que parmi les champions nationaux tricolores, se trouvent un certain nombre d'entreprises de grande distribution qui sont des acteurs majeure de la mise en concurence des entreprises industrielles avec les pays à bas coût de main d'oeuvre... Ceci étant dit, il faut se méfier des chimères : la mise en place d'un protectionnisme européen, en particulier au niveau de l'UE, n'est certainement pas pour demain (à moins qu'une grave crise change la donne). Mais au moins, que la direction de la conccurrence de la commission européenne n'empêche systèmatiquement les mesures prises par les états nations pour s'adapter "par le haut" à la mondialisation, y compris au prix de quelques entorses au principe de la concurrence libre et non faussée... et franchement l'idéologie (au sens de ce qui est la pensée dominante du moment)est tout de même clairement libre-échangiste...
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